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Libération
Critique

Ouvrages au désespoir

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Fiches. Un siècle d’édition et quatre années de bibliothèques en guerre.
publié le 18 décembre 2008 à 6h51

Des millions de livres circulent dans l'étude de Martine Poulain consacrée aux bibliothèques pendant la guerre. Ce sont les collections de valeur, évacuées à partir de 1938, dont les forces d'Occupation réclameront le retour. Ce sont les caisses où s'entassent les ouvrages volés, acheminés vers l'Allemagne. Ce sont, enfin, les livres qui reviennent après 1945, environ deux millions d'ouvrages retrouvés, soit seulement 20 %, estime-t-on, de ce que les Allemands ont emporté. Aucun livre de Heinrich Heine ne sera restitué à son propriétaire, aucun livre de Proust. Sur les 5 000 titres que comptait sa bibliothèque, voici ce que Vladimir Jankélévitch, pour ne prendre que ce seul exemple, récupérera : «257 volumes de musique, 71 volumes de philosophie attribués en 1946, 20 + 16 livres restitués en 1949.»

Bernhard et Otto.Les Allemands n'ont pas besoin de se servir dans les bibliothèques publiques. Celles des institutions juives et étrangères (bibliothèques polonaise ou russe à Paris) font très bien l'affaire, ainsi que les trésors accumulés par les particuliers, la plupart juifs, professeurs, écrivains, médecins, avec leurs éditions complètes de Buffon, Voltaire, Rousseau. Dans l'entrepôt de la gare d'Austerlitz, triant les biens volés du Pr Jean Ascoli, ses notes de cours, ses livres, un ancien élève de l'Ecole normale supérieure parvient seulement à sauver le Chemin des saisons, d'Auguste Angellier, «avec une belle reliure, qui m'a fait penser q