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Libération
Critique

L’esprit des Weil

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Famille. Sylvie, André, Simone.
publié le 15 janvier 2009 à 6h51
(mis à jour le 15 janvier 2009 à 6h51)

C'était son premier succès : un prix au concours général. Elle devait avoir 17 ans. Il y avait eu une cérémonie dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, réunissant les meilleurs élèves de France. Le lendemain, photo à la une de France Soir.«C'était moi. Juste au moment où le général de Gaulle, penché vers moi, me serrait la main.» Elle avait sa jolie robe à fleurs, «achetée chez Franck pour l'occasion», et «sa vieille veste en cuir blanc, un peu sale», que toute la famille lui reprochera de ne pas avoir ôtée. «Le général me disait quelque chose d'aimable et moi, les yeux levés, je le regardais.» Les mots du grand homme ? Juste : «J'ai beaucoup admiré votre tante.» Ce n'était même pas vrai. A Londres, il avait dit qu'elle était «complètement folle», la tante - mais peu importe. «"J'ai beaucoup admiré votre tante." Pas un mot de plus, même pas : "Félicitations, mademoiselle !" Rien.» Au-dessus de la photo, en gros caractères, on lisait : «La fille du mathématicien Maurice Weil (erreur vexante pour mon père !), lauréate du concours général, reçoit ses prix des mains du général de Gaulle.» L'édition du soir change la légende : «La nièce de la philosophe Simone Weil, etc.» Devenue agrégée de lettres classiques, elle ira rendre visite à «l'un des grands professeurs de grec de la Sorbonne», pour fixer un sujet de thèse. Et s'entend dire : «Alors, ce sera Platon comme vo