C'est l'histoire d'une femme tellement effacée, tellement peu considérée dans sa famille, que le romancier Karel Schoeman choisit de ne pas lui donner de nom. On s'en aperçoit une fois le livre refermé. On a passé tout ce temps avec un personnage et son entourage, on connaît désormais trois générations - Papa, Maman, Jakob, Pieter, Sofie, Stienie, Maans - mais elle, la survivante, on ne sait pas comment elle s'appelle. Elle est à la rigueur «Tantie» pour son neveu et son épouse antipathique qui prend le pouvoir, mais c'est comme le jour où on parle d'elle comme d'«une brave petite vieille». Elle l'a entendu, car rien ne lui échappe, elle a ça en horreur, nous aussi. D'abord, elle n'est pas si brave. Elle est, par certains côtés, aussi sèche que sa mère, une femme dure et «inaccessible» dans l'ombre de laquelle elle a passé cinquante ans. On l'imagine mal en «Tantie», même si elle a élevé le neveu comme son fils. Etant un écrivain qui s'ignore, elle est aussi distante que l'auteur, aussi sévère que les héros des romans précédents, En étrange pays,la Saison des adieux,Retour au pays bien-aimé, livres d'une beauté austère, mais qui sont presque des divertissements légers à côté de cette ascèse, Cette vie.
«Mailles».Le Sud-Africain Karel Schoeman ne donne pas de nom à cette vieille dame qui va mourir, il lui donne un pays, une existence. Elle se souvient des jours passés. Elle est née pour cela, se souvenir, u