Il y a une quinzaine d'années, aux Etats-Unis, le Républicain Newt Gingrich avait proposé aux pouvoirs publics cette idée formidable : offrir à chaque étudiant 2 dollars par ouvrage lu, afin d'inciter la jeunesse à se plonger dans les livres. La chose en est restée à un stade embryonnaire, pour une raison bien simple : difficile de vérifier qu'un bouquin a bien été lu. Il aurait fallu recruter une armée de contrôleurs, et leur tâche aurait été délicate : «Mais dites-moi, jeune homme, quel est donc le plat préféré de Monsieur de Norpois dans A l'ombre des jeunes filles en fleurs ? a) Le soufflé de kiwis b) Le bœuf en daube c) Le flan de courgettes au paprika».
Depuis, on a totalement renoncé à faire lire les jeunes, là-bas comme ici. Trop compliqué, pas de bénéfices à court terme, et puis l'avenir n'est-il pas aux réseaux numériques ? Le Los Angeles Times a laissé tomber son supplément littéraire en 2007. Ce mois-ci, c'est le Washingon Post qui arrête son cahier hebdomadaire Book World. Désormais, le New York Times et le San Francisco Chronicle sont les deux derniers quotidiens américains qui accordent encore un peu de place à la critique littéraire, on se demande bien pourquoi.
Le patron du Washington Post, Marcus Brauchli, a expliqué sa décision en termes délicats : «La quantité de publicité paraissant dans Book World ne justifiait plus le volume d'espace que nous consacrions chaque semaine à l'actualité litt