Quand John Berger ne voyage pas, il partage son temps entre la banlieue parisienne et un minuscule village de Haute-Savoie. Cela fait quarante ans qu'il vit en France, mais ça ne change rien : il est peu connu ici et célèbre là-bas. Comme l'écrit l'Observer, c'est tout simplement «le plus influent des intellectuels de ces cinquante dernières années». On pourrait ajouter que, depuis la mort de Harold Pinter, c'est aussi le dernier des vieux lions marxistes du Royaume-Uni, pas sûr que ça lui fasse plaisir, disons que c'est un des derniers écrivains «engagés» en Europe.
Atelier. Né en Angleterre en 1926, John Berger a commencé par être peintre. A l'époque, il était ami du psychanalyste Donald Winnicott qui lui prêtait une pièce où il avait installé son atelier. A l'étage, Berger peignait. Au rez-de-chaussée, Winnicott recevait ses jeunes patients. Berger écrit depuis les années 50 : romans, essais, poèmes et scénarios, dont Jonas qui aura 25 ans en l'an 2000 d'Alain Tanner.
Deux lignes relient tout ce qu'il a fait. Le témoignage (et souvent le combat) pour les opprimés. En 1972, il reçoit le Booker Prize pour G., roman dont le héros est une sorte de Don Juan féministe. A la remise du prix, il donne la moitié de la somme aux Black Panthers. L'autre ligne, c'est un intérêt intense pour l'art. En Grande-Bretagne, son livre Voir le voir (1972) a révolutionné la manière de parler de l'art et formé des générations d'artistes