Menu
Libération
Le Libé des écrivains

Colonna et la dernière séance

Article réservé aux abonnés
Procès. La reconstitution vidéo vire au cafouillage.
par Frédéric Ciriez
publié le 12 mars 2009 à 6h52

Yvan Colonna porte le nom même de la justice. Par son prénom, qui est une forme dérivée de Yves, le saint patron des juristes, Yves de Kermartin (1250-1303), qu’on ne croisera pas sur Facebook mais dont le crâne peut éventuellement nous sourire, entre deux tibias, dans sa châsse de la cathédrale de Tréguier, austère cité médiévale des Côtes-d’Armor ; par son patronyme, qui évoque la symbolique architecturale des Colonnes de justice.

A l’inverse, Yvan Colonna est tout entier un problème de nom pour la justice : il possède un patronyme corse associé à un acte terroriste - l’exécution du préfet Erignac en 1998 ; son nom a longtemps été celui du suspect absolu alors qu’il avait pris le maquis de 1999 à 2003 (s’il avait porté le nom de jeune fille de sa maman, Cécile Riou, bretonne originaire du village de Laz en Cornouaille, peut-être aurait-il pris la mer) ; le nom Colonna a été «soufflé» aux enquêteurs par ses anciens amis du commando Erignac, ceux-là même qui l’innocentent aujourd’hui ; le nom de l’assassin Colonna a été publiquement cité en 2003 puis en 2007, sans respect de la présomption d’innocence, par Nicolas Sarkozy, l’actuel berger de la République.

Colonna, Yvan Colonna… On est tiré de notre méditation onomastique dans la file d’attente publique de la cour d’assises spéciale de Paris par quatre gendarmes immobiles qui nous font signe de passer.

On prend place dans la salle d'audience, sur un banc du fond, entre un supporteur sexagénaire du condamné corse en sweat Lotto