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Libération
Critique

Auberge de Genette

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Le cahier Livres de Libédossier
Préférence. Avec «Codicille», l’auteur de «Bardadrac» poursuit son abécédaire. Zou, zigoto !
publié le 16 avril 2009 à 6h53
(mis à jour le 16 avril 2009 à 6h53)

Ecrire, c'est apprendre à mourir - autrement dit, à vivre. Il n'est jamais trop tôt ni trop tard, et, à bientôt 80 ans, Gérard Genette poursuit ses apprentissages : le mot est ici un acte du cœur. En 2006, le grand critique publiait un abécédaire intime, Bardadrac. C'était un livre autobiographique profond et divertissant (l'un va rarement sans l'autre), plein d'amitié armée pour les hommes, les mots, pour ce qu'ils disent et ne disent pas. Genette flânait dans ses souvenirs et dans les livres sous le signe de Montaigne, le regard clair et la patte précise, sérieux sans esprit de sérieux, comme un vieux félin jouant avec une pelote ou triant des arêtes. Le ton était donné par l'ironie - forme méandreuse d'autodérision sans ostentation, d'enthousiasme méfiant, de discrétion révélée, variation pleine de bon sens sur les ordres du discours. L'immense culture de Genette ne s'accompagnait d'aucune cuistrerie : elle ne semblait destinée qu'à le (et nous) simplifier. Il y avait des entrées ouvrant sur des choses lourdes, d'autres sur des choses légères, c'était bien : comme dit Montaigne, l'âme se fatigue à être continuellement tendue. On riait avec Bardadrac, d'un rire qui permet de croire qu'on est (ou qu'on pourrait devenir) intelligent.

«Désordre alphabétique».Sous la forme de Bardadrac et sur le même ton, Codicille en est la suite, mais pas forcément la fin - même si la dernière entrée de ce nouveau recueil, «Zou», se termine