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Libération
Critique

Les premiers outrages d’Alaa el-Aswany

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Egypte. L’auteur de «l’Immeuble Yacoubian» prend sa revanche sur la bureaucratie.
publié le 30 avril 2009 à 6h51

Alaa el-Aswany sait mesurer le chemin parcouru. Quand il rédige ses premières nouvelles, il y a une quinzaine d'années, le jeune écrivain qu'il est alors ne doute de rien. Encouragé par ses amis, il entreprend de présenter son manuscrit à l'Office national du livre, passage obligé pour l'édition en Egypte. Et s'entend notifier un refus catégorique, assorti d'une cinglante justification : «Vous insultez l'Egypte.» La nouvelle en question, qui donne son titre au recueil, raconte la désillusion d'un jeune homme confrontant l'aura, l'image et le mythe entretenu autour de la nation égyptienne, à son quotidien fait d'arbitraire, de déliquescence morale et d'hypocrisie.

Le récit est à la première personne. Un choix narratif qui s’est donc avéré fatal pour la publication de l’ouvrage, mais essentiel pour la suite de la carrière littéraire d’Alaa el-Aswany. Lequel, des années plus tard, reste abasourdi d’avoir eu à expliquer la différence entre réalité et fiction, auteur et personnage, à ceux chargés de décider du sort des publications d’un pays jadis vanté pour son excellence littéraire.

L'expérience, pour toute malheureuse qu'elle fut, n'a fait que le conforter dans sa certitude que les choses devaient être dites telles qu'il le souhaitait, dans la cruauté, la précision, la tendresse ou la hargne parfois de son imagination de romancier. Ses rencontres kafkaïennes avec les fonctionnaires bornés, les bienséants, les faux dévots, les lèche-bottes en tous genres ont nourri avec su