L'auteur est un Autrichien né en 1959, bardé de prix, mais c'est au surréalisme belge qu'on pense en lisant les neuf nouvelles de Midi, soir et matin. Plus précisément au tableau de Magritte, la Reproduction interdite (1937), qui représente un miroir : celui-ci ne reflète pas le visage de l'individu qui lui fait face, mais son dos. Midi, soir et matin, sans quitter la réalité la plus élémentaire, la plus quotidienne, s'interdit pourtant de la reproduire. Quelle que soit la personne à laquelle ils s'expriment, faussement arrimés à leur «je», pour finir désincarnés en «il», les protagonistes connaissent des aventures bizarres avec leur reflet aussi bien qu'avec leur ombre, ou leur double - on donnera le nom qu'on veut à l'avatar qui les tracasse. Dans la glace, il y a toujours un étranger, il va falloir s'habituer. La nouvelle-titre le dit : «Désormais cela se produisait fréquemment. Les noms sur sa porte ne cessaient de changer. Le matin il quittait la maison, et on le reconnaissait à chaque fois, même si on ne le prenait pas pour celui pour lequel il se prenait lui-même.»
Dépouille.Un animal kafkaïen, «son abdomen mou et vulnérable» mal protégé par la carapace, crapahute dans «Rencontre». Une fourmi qui trottait par là «lui passa dessus, pour toucher rapidement son visage, son museau, et disparut sous les petits cailloux, revint et traversa la gueule de l’animal jusqu’à ses yeux, rongea, grignota, disparut, revint pour