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Libération

La fugue impossible

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Le cahier Livres de Libédossier
publié le 14 mai 2009 à 18h27
(mis à jour le 14 mai 2009 à 18h27)

Quand le titre du roman trouve sa justification, on en est à peu près aux deux tiers de la lecture, et il s'est passé un nombre de choses considérables - ces cascades d'événements qui sont la marque de la littérature de divertissement. L'héroïne a traversé trois histoires d'amour, subi trois deuils dont le pire de tous, échappé elle-même à la mort par suicide, planté sa fourchette dans le cou d'une rivale, publié un livre et changé deux fois de carrière. Elle était diplômée de Harvard et a renoncé à un poste de titulaire dans une université cotée pour devenir trader. Puis le monde de l'argent n'a plus voulu d'elle, et elle est allée enseigner dans une fac de troisième ordre. «Quand on est incapable de se supprimer, quelle solution reste-t-il ?» se demande la narratrice au bout du rouleau, qui vient de marcher par mégarde sur les comprimés qu'elle comptait avaler. Et d'enchaîner aussitôt sur la réponse : «Quitter le monde.»

Installation au Canada, nouvelle orientation professionnelle, nouvel épisode amoureux envisageable quoique compliqué, intervention décisive dans un fait divers atroce : on n'est pas sorti de l'auberge. Et on prolongerait volontiers le séjour. La différence entre Douglas Kennedy et les autres fabricants d'intrigues captivantes couronnées de succès réside dans sa générosité et dans son pessimisme fébrile. Ses personnages sont régulièrement envoyés en enfer selon la logique bien connue de la spirale, et on n'est jamais sûr qu'il les en sortir