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Libération
Critique

Leurs états d’Amérique

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Chroniques. Dans deux ouvrages intimistes, Joyce Carol Oates et Joan Didion explorent en écho sixties et seventies.
publié le 4 juin 2009 à 6h53
(mis à jour le 4 juin 2009 à 6h53)

De son propre aveu, Joyce Carol Oates est une droguée : «Ecrire, dit-elle, est… une drogue, douce, irrésistible, et épuisante.» Depuis le milieu des années 60, elle publie des romans, des nouvelles, de la poésie, des critiques. Au total, plus d’une centaine de titres. Virtuosité ou dispersion, cette prolificité est devenue sa marque de fabrique. Et ce n’est pas la parution de son journal qui prouvera le contraire. Le texte complet comptant plus de 4 000 pages dactylographiées (conservées dans les archives de l’université de Syracuse), l’éditeur a choisi de limiter le présent volume aux années 1973-1982. Une décennie pour cerner l’une des figures les plus fameuses de la littérature américaine, à travers la forme particulière de l’écriture diariste.

Heures de piano. De ces pages rédigées «au fil de la plume et spontanément» émerge le portrait d'une femme drôle, curieuse, loin de l'image craintive et austère qu'elle traîne dans les médias. Il faut dire que Joyce Carol Oates fait là ce qu'elle n'a jamais encore fait dans sa production romanesque : parler du bonheur. Le bonheur de son mariage avec Raymond Smith, celui de sa vie d'enseignante (à Windsor, puis à Princeton), celui des heures passées au piano, à tenter de saisir Chopin. Il ne s'agit pas tant d'évacuer ses doutes et ses incertitudes que d'exprimer l'authentique banalité d'une vie à deux : «Ce qui est à portée, ce qui fait partie du quotidien de la vie, n'a jamais vraiment d'impo