Le 30 juillet 1937, Staline, dans un ordre du jour resté secret, appelait à éliminer les «éléments contre-révolutionnaires», lançant ainsi une grande terreur qui ne s'interrompit qu'en novembre 1938. De cette folie meurtrière, la mémoire collective a avant tout retenu la purge exercée contre les communistes et les militaires, épisode amplement relaté par les bolcheviques ayant survécu. La réalité fut tout autre : le cataclysme frappa le peuple soviétique dans son ensemble, et non les seuls membres du Parti communiste qui ne pèsent, si l'on ose dire, que pour 7 % des victimes.
Camp.Staline ne cherchait pas à mettre au pas un appareil rétif. Frappé par l'échec de la collectivisation et les fortes tensions qui se développèrent dans les campagnes, mesurant le risque probable d'une guerre mondiale, il craignait que des opposants, tapis au cœur de la société, ne sapent le pouvoir soviétique. A ce compte, tout citoyen devenait un ennemi en puissance, qu'il s'agisse des koulaks libérés revenus au village, des minorités - lettone, ukrainienne ou polonaise - dont la fidélité à la Russie pouvait être suspectée, des ci-devant socialistes-révolutionnaires - sans parler des popes du clergé orthodoxe. Ordre fut donc donné de liquider cette cinquième colonne potentielle, en fusillant les individus ou en les condamnant à dix années de camp. Chaque région reçut un quota que les sbires des Services s'efforcèrent bien souvent de dépasser pour complaire à leurs maîtres.
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