«Troisième partie, 55 janvril…» Est-ce que la voix est raccord ? «Déjà quatre ans et des jours que je suis là, se dit Jacquemort. Sa barbe avait allongé…» Fanny Cottençon entame la lecture de la troisième partie de l'Arrache-cœur. Dans la cabine insonorisée, la comédienne est assise à un pupitre, bouteille d'eau et mouchoir à portée de main, partie pour trois heures de monologue. La société de production musicale Soondbox, situé dans le IIIe arrondissement de Paris, enregistre régulièrement des livres audio. Quatre demi-journées sont consacrées au roman de Boris Vian, dont on fête le cinquantième anniversaire de la mort aujourd'hui (1).
«Joyeux». Le disque sera «sous presse» à la rentrée. «Le comédien peut rester trois heures le matin, trois heures l'après-midi, explique François Bellein, cofondateur de la société Soondbox. Le rythme moyen, de cinquante pages par demi-journée, demande de la concentration et une fraîcheur intellectuelle et physique.»
De l'autre côté de la cabine, à la régie, son collaborateur suit du doigt les mots prononcés par Fanny Cottençon, lui demande de reprendre à un mot mal dit ou oublié. «Il tomba une pluie fine et pernicieuse et on toussait. Le jardin coulait, gluant. On voyait à peine la mer, du même gris que le ciel…» Fanny Cottençon n'avait jamais lu de livre en entier, ni même l'Arrache-cœur avant qu'Audiolib, éditeur spécialisé dans les livres lus à voix haute, ne