Ce livre glaçant relève plus de l'histoire que de la littérature. Il est constitué de lettres que des accusés ou certains de leurs proches envoient à Staline durant les années 30, dans l'espoir presque toujours déçu d'éviter l'exécution. Leur sincérité est aussi indéterminable que celle de Clotilde Reiss devant faire face ce mois-ci à un tribunal de Téhéran. C'est le témoignage d'êtres confrontés à une prétendue justice qui est injustice manifeste. Comme l'écrit Luba Jurgenson dans sa préface, «ces textes éclairent non seulement l'image que les Soviétiques ont de leur guide, mais aussi une dimension esthétique et discursive propre à l'époque stalinienne». Le livre s'intitule Lettres au bourreau, et Staline y est à la fois le juge et le bourreau, à une petite réserve près : «En théorie, la marge de manœuvre des subalternes était très réduite, voire inexistante, et, pourtant, l'éternelle incurie russe a fait que l'efficacité des répressions s'enrayait parfois, laissant des échappatoires, des failles.» A l'exception de Mikhaïl Cholokhov (qui a d'ailleurs droit à une réponse personnelle de Staline), tous ceux qui ont écrit ou dont il est question dans ces lettres furent tués, assassinés quand ils étaient réfugiés à l'étranger, exécutés après procès quand ils étaient encore en URSS. Seule Zinaïda Reich fut assassinée «par des inconnus» dans son appartement moscovite, son mari, l'homme de théâtre Vsevolod Meyerhold, étant pour sa part fusillé co
Lettres et ne plus être dans l’URSS des années 30
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par Mathieu Lindon
publié le 27 août 2009 à 6h54
(mis à jour le 27 août 2009 à 6h54)
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