Comment les chambres visitées par Michelle Perrot ne seraient-elles pas romanesques ? «Les retrouver dans le dédale et l’enchaînement des textes fut le principal plaisir de cette recherche», écrit l’historienne, qui tient avec son sujet «fil d’Ariane» et «caverne d’Ali Baba», franchissant les murs de centaines de résidents réels ou imaginaires avec un bonheur et une émotion communicatifs. Il s’agit de répertorier, et d’inventorier, la chambre à coucher, celle que nous avons toujours connue, mais n’a pas toujours existé comme ça ; celle qui semble en voie de disparition dans le logement contemporain, lequel privilégie la chambre des enfants.
Le XIXe siècle à son terme est l'âge d'or des dandys amateurs de bric-à-brac, mais, auparavant, il marque l'avènement de la chambre conjugale pour les classes moyennes (après 1840) comme pour les aristocrates embourgeoisés. «Le lit est tout le mariage», dit Balzac. Zola est un formidable architecte d'intérieur, très au courant des codes sociaux, qui fait mourir Nana dans une chambre d'hôtel, et Gervaise hors de la chambre où elle avait cru achevée sa réussite sociale.
Révolution. L'univers caméral est lié à la lecture, à l'écrit, à l'écrivain. Sans parler des chambres de malades (Proust, Joë Bousquet), une chambre à soi est indispensable à la création, qu'elle appartienne aux romancières anglo-saxonnes, Virginia Woolf en tête, ou à Simone de Beauvoir, rentrée chez elle après la vie de café. On la