On devrait prêter davantage d'attention aux abeilles et aux guêpes. Surtout celles du Panama. Heureusement, un groupe de chercheurs de la Zoological Society de Londres s'est avisé d'aller là-bas et, «six mille heures durant», a observé «422 guêpes», électroniquement baguées, appartenant à 33 nids. Ont-ils découvert l'Amérique ? En quelque sorte, oui. Quand on sait tout juste que, comme les fourmis et les termites, abeilles et guêpes sont des «insectes sociaux», on suppose que leurs sociétés sont de nature, que la nature assemble ceux qui se ressemblent, et donc qu'en chaque ruche s'affairent seulement les petites bêtes «indigènes», celles qui sont là «par naissance». On conçoit mal que quelques abeilles ouvrières, par plaisir ou nécessité, «émigrent» et optent pour un nid de leur choix. Or, ce qu'ont montré les savants britanniques, c'est qu'une majorité d'abeilles (56 %) changent de nid au cours de leur vie, qu'elles n'en intègrent pas un nouveau en tant que «visiteurs temporaires et importuns, sans cesse discriminés et marginalisés, toujours sujets de soupçons et de ressentiment», mais en tant que «membres entiers et légitimes» de la communauté d'adoption. Bigre ! Ne disait-on pas que la socialité a des limites innées, gravées par la nature ? Eh bien non : les nids sont en général composés de «populations mêlées», au sein desquelles «guêpes indigènes et immigrantes» vivent et travaillent côte à côte, «se serrant les
Critique
L’abeille, l’ère liquide et le consommateur
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Le cahier Livres de Libédossier
par Robert Maggiori
publié le 3 septembre 2009 à 0h00
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