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Libération
Critique

Marie a tout pris

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Jean-Philippe Toussaint met le feu au troisième épisode de ses amours impossibles
publié le 17 septembre 2009 à 0h00

La vérité sur Marie, c’est qu’elle n’existe pas. Ni Marie ni la vérité. C’est-à-dire aussi qu’elle existe à fond, à plein régime fictionnel. Ce n’est pas écrit dans le livre : c’est ce qu’on ressent après s’être fait piétiner par ce bolide en feu qu’est le nouveau Jean-Philippe Toussaint, à peu près aussi jouissif qu’un déluge de météorites dans les reins, si les reins étaient les lobes du cerveau (par exemple).

Commencé dans une «nuit caniculaire», ce troisième volet des amours du narrateur et de Marie, après Faire l’amour et Fuir (1), oblique très vite vers une longue hallucination ténébreuse, traversée par un pur-sang sous la foudre et descendant aux enfers en plein ciel, dans les soutes d’un avion-cargo. Le roman traditionnel fout le camp, le narrateur avec(«basta avec moi maintenant», prévient-il obligeamment), et nous voilà précipités dans une terreur secrète, un nouvel ordre de choses qui n’est autre que «la persistance du réel», un truc à se cogner la tête et à faire vomir un cheval nommé Zahir, celui de Marie, même si les chevaux, on l’apprend au passage, ne peuvent physiologiquement pas vomir. Peu importe, puisqu’il s’agit de pousser au max la puissance de l’imaginaire, jusqu’à éclabousser en «fulgurances de langue» et refondre le réel au creuset de l’écriture. Un peu avant d’ôter le tabouret narratif de sous nos pieds et d’y glisser un tapis volant à 300 cv (et non à un seul comme notre résumé pourrait le laisser croire), Toussaint avait déjà sorti le défibrillateu