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Libération

Pascal Quignard L’écrivain au bulot

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publié le 17 septembre 2009 à 0h00

Pascal Quignard est une précieuse que personne n’a l’air de trouver ridicule. Sa pompe sobre, son érudition surexposée, ses ellipses pleines de vertu, son talentueux baroquisme à retardement, la manière dont il bâtit son personnage par saillies nouées, obscures clartés et coquetteries référencées, tout cela a fini par convaincre ses admirateurs que la littérature, c’est ça et c’est lui. Cercle vertueux, cercle vicieux, cercle des parchemins disparus : tout lecteur lisant Quignard finit par se flatter d’être un lecteur de Quignard.

Pour saisir le mécanisme de ce parfait du subjonctif, montons dans la Barque silencieuse, sixième tome de la série «Dernier royaume», ni tout à fait le même ni tout à fait un autre. Le thème des variations du livre est, pour le dire vite, le passage, la mort, et comment le récit accompagne et symbolise la brève éternité du pas. Il y a des à-côtés, des sorties de thème, des cadences improvisées, des fantaisies et même du charabia : «Nous sommes orphelins d'une joie qui n'avait pas encore devant elle, quand elle vint surgir en nous, un peu après que nous surgîmes sous le soleil de cette terre, de mémoire où se faire souvenir.» La plupart du temps, on retrouve ce mélange sec de lectures, de souvenirs confits et de visions qui fait le charme de Quignard pour ceux qu'il n'a pas fatigués : «On ne sait pas où est cachée sa vie.

«Mozart avait placé sa vie dans un petit canari dont Marianne prenait soin à Salzbourg et qu’elle nourri