Quand on veut, on peut. Ou, pour le dire comme Staline, cité en épigraphe : «Je ne crois qu'à une chose : la toute-puissance de la volonté humaine.» Au nom de ce principe et du premier plan quinquennal, des milliers d'ouvriers parvinrent à faire sortir de terre, littéralement, de gigantesques entreprises, à commencer par l'usine de tracteurs de Kharkov. Pendant ce temps-là, à partir de 1931, se jouait chez les paysans une des pires tragédies du régime et du siècle, les millions de morts de la famine.
Owen Matthews, journaliste à Newsweek, a deux bonnes raisons de raconter l'usine de Kharkov. La première, c'est que son grand-père, Boris Bibikov, était de ces hommes du Parti nommés à la tête du chantier. Boris s'est installé en Ukraine avec sa femme et sa fille aînée, Lénina, qui allait avoir une petite sœur en 1934, Ludmila, la mère d'Owen Matthews. A l'impossible, tous sont tenus. C'est la seconde raison pour laquelle l'auteur des Enfants de Staline a enquêté sur ces moments héroïques : sans ces principes-là, retournés par sa famille contre le pouvoir qui les a inculqués, il ne serait pas de ce monde.
«Réserves».«J'ai écrit mon livre comme un reportage, avec les couleurs que je connais, en essayant de faire vivre les événements et les personnages», dit Owen Matthews, un grand type extraverti avec un parapluie, un Russe francophone très british, ainsi qu'il nous est apparu lors d'un séjour parisien. Le journalisme et