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Le Grand Meaulnes 94 ans et 272 jours plus tard

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Le cahier Livres de Libédossier
publié le 8 octobre 2009 à 0h00

On en connaît chez qui ce roman, vers 13 ans, provoqua des crises de fièvre : pour l'adolescent naissant, le Grand Meaulnes peut être une expérience magique et initiatique - un rite de passage. L'enfance meurt et ressuscite, d'un même mouvement, sur la page et en lui. On ne lit pas ce livre. On le vit, puis on s'en souvient, comme d'un parfum de ce qu'on fut. On se souvient moins de l'intrigue que de quelques scènes, chacun les siennes, révélateurs et symboles de l'état dans lequel elles nous ont mis. Le Grand Meaulnes ne décrit pas le paradis perdu. Il est le paradis et sa perte, et d'autant que ce lieu n'a jamais existé qu'à l'état de perte. Et d'autant que l'auteur est porté disparu treize mois après sa publication, à 28 ans, le 22 septembre 1914. Postérité romantique : celui qui invente le paradis en meurt comme lui. Ensuite, toute relecture est une émotion et une déception.

Publié en 1913, le roman d’Alain-Fournier eut cinq voix au prix Goncourt et tombe cette année dans le domaine public. La disparition de l’écrivain a bénéficié de façon exceptionnelle à ses héritiers : les droits d’auteurs ont été protégés durant 50 ans (loi d’avant 1997), plus 30 ans ans en tant que mort pour la France, plus 6 ans et 152 jours du fait de la Première Guerre mondiale, plus 8 ans et 119 jours du fait de la seconde. Soit 94 ans et 272 jours.

Trois éditions de poche le présentent («GF» Flammarion, «Folio», «Folio-Plus classique»). Peut-il encore être une expérience pour c