Le Roi et la Reine est le récit d'un lien de maîtresse à esclave dans un château en Espagne. C'est une manière de rêver et un rêve auquel on croit, puisqu'il est à la fois simple, sombre, élégant et tordu. Il rappelle les Songes de Quevedo : lorsque la tête rit, c'est le squelette qui remue.
Dans le château madrilène, il y a une belle duchesse franquiste. Elle vit cachée dans le donjon, parmi des tapisseries de Goya, une Crucifixion de Zurbarán, un Greco. Son mari a été fusillé par les républicains, qui occupent la propriété. Son amant vient la nuit. Il tue beaucoup, comme on s'amuse. Elle l'appelle «le diable». Sade est dans la bibliothèque, et des livres de chevalerie. La maîtresse, c'est elle.
Dans le parc, il y a Romulo le jardinier. On est en 1936, pendant la bataille de Madrid. Les républicains ont congédié le personnel, sauf lui, inscrit par hasard dans un parti de gauche. C’est un ingénu massif. On le charge de contrôler le château. Il continue de servir la duchesse, pourrait la dénoncer. Elle dépend de lui, mais continue de l’humilier. L’esclave, c’est lui.
Déchiquetée. Romulo pense à d'autres mondes, des mondes qui rêvent aux hommes. «Mais s'ils rêvent à nous et s'ils nous aiment, dit-il, nous devons le mériter en étant véritablement ce que nous sommes. Vous, une femme. Moi, un homme. En l'étant complètement et jusqu'à la fin.» Mais la duchesse ne semble pas l'écouter. Jamais elle ne lui permet d'être ce qu