«Nous ne parlons pas pour dire quelque chose mais pour obtenir un certain effet», aimait à dire le ministre de la Propagande du IIIe Reich, Joseph Goebbels. Totalitaire ou démocratique, rhétorique ou politique, la langue de bois travaille à accumuler le plus grand nombre de lieux communs, de termes abstraits et de fausses évidences pour masquer les vérités peu avouables. L'affaire semble entendue, mais l'enquête de Christian Delporte, historien des médias, n'en est pas moins passionnante. Pas de doute, pour lui, il s'agit bien d'un art : celui du mensonge et de l'esquive, dont il retrace l'histoire depuis 1789 jusqu'à nos jours.
De Robespierre à Jean-François Copé, en passant par Staline ou de Gaulle, la langue de bois y est analysée et illustrée d'exemples sublimes. «C'est aux Français de décider. Je trouve qu'on est bien léger de décider à leur place», déclarait ainsi Jacques Chirac, en 1993. La même année, dans son Dictionnaire de la réforme, Edouard Balladur n'hésitait pas à écrire : «Toute politique de réforme a pour ambition de construire un avenir autre que le présent.» Quant à Jack Lang, alors ministre de l'Education nationale, on l'entendit clamer avec passion, en 1992 : «Ma plus belle récompense, c'est pouvoir faire le plus beau métier du monde.»
Ne pas choquer quitte à tomber dans la démagogie. Place au consensus. Le gouvernement ne change pas de politique, il s'adapte. Il ne subit pas la crise, il la