Charles D'Ambrosio est né à Seattle, Washington, un an avant le suicide d'Ernest Hemingway à Ketchum, Idaho, où il s'est rendu seul à 20 ans, dans des wagons de marchandise, comme un personnage de Jack Kerouac. Hemingway s'est tiré une balle dans la tête en 1961, comme le plus jeune frère de D'Ambrosio en 1987, comme le père de l'une de ses nouvelles, «le Cap»(publiée dans le Cap, Gallimard).
Le père d'Hemingway, lui aussi, s'était suicidé. Celui de Charles D'Ambrosio est professeur d'économie à l'université, vivant, et ça n'a pas l'air d'aller très fort. Un autre texte de l'écrivain, «Documents», publié en 2002 dans le New Yorker (et dans Orphelins, Albin Michel), semble indiquer qu'ils ne communiquent plus depuis un échange de lettres pleines de vérités et de grilles étouffantes : «J'ai souvent pensé que l'unité de mesure qui convient le mieux à la prose est la respiration humaine, mais il n'y avait pas d'air dans les phrases de mon père : il semblait suffoquer à l'intérieur.» Cette densité ne va pas sans angoisse, sensibilité, ni, à l'occasion, absence de pitié. Un jour, le père a écrit à son fils : «Qu'ai-je donc détruit en toi qui ne l'était déjà ?» Dans les nouvelles de Charles D'Ambrosio, les fils ont une conscience qui a grandi vite. Ils comprennent plus qu'ils ne savent. Des enfants demandent à l'un d'eux, adolescent : «Raconte-nous des histoires.» Il répond : «Je ne connais pas d'histoires p