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Libération
Critique

L’âme des cavernes

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Pour Albert Piette, l’homme est un singe qui doute
publié le 3 décembre 2009 à 0h00

Une des découvertes les plus excitantes dans ce livre court et dense, c’est une intuition lumineuse de la différence fondamentale entre le singe et l’homme. On y trouve aussi une hypothèse très convaincante sur la raison pour laquelle Néandertal a disparu : il se serait laissé mourir pour cause d’angoisse métaphysique. Reprenons.

Dans cet essai (au titre assez peu engageant, ne vous laissez pas décourager), Albert Piette, professeur d'anthropologie à l'université d'Amiens et à l'EHESS, poursuit son étude des micro-oscillations de nos gestes et pensées les plus ordinaires, grâce à laquelle il construit une «anthropologie du détail».

La particularité des humains par rapport aux grands singes, dit-il, est une «présence-absence», une attention détachée, une coexistence des modes majeur et mineur. Le mode mineur étant fait de «moments vides», de «gestes secondaires» et de «pensées vagabondes», la «minimalité» étant cette manière de «ne pas pousser à fond la conscience», d'être toujours «pénétré par d'autres choses que ce qui fait l'enjeu précisément de la situation». Cette aptitude (ou attitude ?) fait aussi que le malheur n'est jamais absolu, même à Auschwitz («Encore faut-il s'estimer heureux qu'il n'y ait pas de vent»), comme le notait Primo Levi dans Si c'est un homme ; le bonheur non plus, ajoute Piette, citant Schopenhauer.

«Névrosés». L'anthropologie d'Albert Piette n'es