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Libération
Critique

Ces guerres si viles

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La Commune de Paris, l’insurrection des Canuts à Lyon, deux ouvrages plongent dans les contradictions de la France fratricide
publié le 17 décembre 2009 à 0h00

Il est sans doute dans la nature des sociétés humaines de s'entre-déchirer périodiquement. Mais la France contemporaine, pourtant volontiers donneuse de leçons, semble avoir cultivé plus que d'autres l'affrontement fratricide. La période ouverte par la Révolution française est à ce titre particulièrement révélatrice : à compter de «quatre-vingt-treize», c'est-à-dire de la Terreur et des soulèvements de Vendée, le pays a fait de la guerre civile une douloureuse spécificité nationale. En 1830, 1831, 1834, 1839, 1848, 1871, puis sur un autre rythme jusqu'à la Libération, il s'est le plus souvent montré incapable de gérer pacifiquement ses dissensions, à tel point que la guerre civile en est venue à incarner «la matérialité de cette "exception française" devenue un lieu commun de l'historiographie».

Emancipation. Historien du XIXe siècle, Jean-Claude Caron s'est attaché à comprendre les formes spécifiques de ces luttes intestines. Deux temps organisent son propos. Le premier, nourri des travaux de nombreux philosophes, sociologues ou juristes, s'attache à circonscrire de surplomb les «frontières» ou les «modèles» d'une catégorie - la guerre civile - finalement assez peu travaillée par les sciences sociales et dont la définition reste floue. Le seul point vraiment saillant concerne sa réprobation. A l'exception de quelques voix isolées, comme celles de Mably au XVIIIe siècle ou celles de Bakounine et de Sor