Le Colombien Juan Gabriel Vásquez, admirateur fertile de García Márquez et de quelques autres, a 36 ans, vit à Barcelone et raconte la triste aventure de son pays : «L'Histoire est la version du pouvoir, le roman est une manière de lui ôter sa prépondérance, nous disait-il en décembre à Paris. L'histoire de la Colombie est celle de la trahison du peuple par les classes dirigeantes, avec l'aide efficace de l'Eglise, dont la présence est toujours nocive.» Vásquez est fils d'avocat. Il a fait des études de droit et il a vite changé de destin, en Europe.
Sa précédente fiction, les Dénonciateurs, évoquait les rapports de sujétion de la Colombie avec les Etats-Unis, pendant et après la Seconde Guerre mondiale, à travers le sort funèbre fait à des Juifs allemands exilés. Le récent passé de la Colombie n'en sortait pas plus grandi que les coulisses d'une opérette où l'on tue salement les seconds rôles ; mais il était précisé. Une histoire de révolutionnaires nihilistes l'avait influencé : Sous les yeux de l'Occident, de Joseph Conrad, «l'un de mes dieux tutélaires».
Colonialisme. En 2006, il raconte la gestation de son nouveau livre, Histoire secrète du Costaguana, dans un recueil d'essais non traduit, l'Art de la distorsion (El arte de la distorsión, Alfaguarra, 2009) : «J'ai fini il y a quelques mois un roman qui m'a posé des problèmes inédits. Son titre provisoire est Histoire secrète du Costaguana.