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Libération

La tête dans les étoiles avec Willa Cather

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publié le 7 janvier 2010 à 0h00

Comme certains vont directement au cœur des choses, Willa Cather va directement au cœur de l'émotion. Lucy Gayheart, l'avant-dernier roman de l'Américaine née en 1873 et morte en 1947, date de 1935. Il est plus noir, plus dur que la plupart de ses autres textes, ce qui lui donne une forme un peu particulière de tendresse. En évoquant son héroïne dans le premier paragraphe, c'est comme si Willa Cather mettait en scène son propre travail. «A Haverford, sur les rives de la Platte, les gens de la ville parlent encore de Lucy Gayheart. Ils n'en parlent pas beaucoup, c'est vrai ; la vie suit son cours et nous vivons dans le présent. Mais lorsqu'ils mentionnent son nom, leur visage ou leur voix s'anime doucement d'une lueur confiante, de quelque chose d'intime dans le regard qui dit : "Ah, vous aussi, vous vous rappelez ?" Ils la voient encore comme une forme fluette en mouvement constant ; en train de danser, ou de patiner, ou de marcher d'un pas vif et décidé, comme un oiseau qui rentre chez lui.» Il y a certes encore plus de force dans l'œuvre de Willa Cather que dans les traits qu'elle offre à son personnage, mais la confiance, l'intimité, cette sorte de joie émue, de nostalgie tout ce qu'il y a d'actuel qui lui appartiennent disent parfaitement quelque chose de son travail. Yehudi Menuhin, le pianiste virtuose, fut un proche de Willa Cather quoiqu'elle ait eu plus de quarante ans de plus que lui, et il raconta comment il avait toujours pu s'appuyer sur elle d