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Libération
Critique

La vie de Bryan

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Jonathan Coe ressuscite B.S. Johnson, héros de l’avant-garde littéraire
publié le 7 janvier 2010 à 0h00

Commençons l'année avec un plaidoyer pour le roman : l'énorme biographie de B.S. Johnson, auteur d'avant-garde, par Jonathan Coe, auteur grand public. Bryan Stanley  Johnson, né en 1933, suicidé en 1973, ne jurait que par Joyce et Beckett. La littérature était pour lui «une course de relais, le témoin de l'innovation se transmettant d'une génération à l'autre». Il considérait que le roman était une forme idéale, à condition qu'il ne raconte pas d'histoire. La vérité est incompatible avec la fiction, aura-t-il répété au long de sa brève et intense carrière. Jonathan Coe, né en 1961, fameux depuis Testament à l'anglaise, représente une génération qui n'a plus de tabou, et pense, tel les écrivains d'autrefois vomis par Johnson, que la fiction nous promet bien du plaisir.

Comme toujours dans les débats littéraires, l'affaire est plus compliquée, et le combat de B.S. Johnson, pas aussi daté qu'il y paraît. Bien sûr, il rappellera leur jeunesse à ceux qui ont grandi avec les exigences esthétiques des années 70. Mais cette relation ambiguë avec l'imagination, cette austère volonté d'ôter les masques, de dire la vérité, ne sont-elles pas à l'œuvre, et combien vivaces, chez nos tenants de l'autofiction ? Et inversement, l'ami Bryan, si à cheval sur la sincérité, si soucieux de réel, ne se permet-il pas des délires ? Dans R.A.S. Infirmière-Chef, le cinquième de ses sept romans, paru en 1971 (et traduit en France aux éditions Quidam, grâce à qui renaît le géni