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Libération
Critique

Du Chevillard premier Choir

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Un monde clos, maudit, avec Jésus local et bourreau
publié le 14 janvier 2010 à 0h00

Choir : vaste projet et mot qu'on lit d'abord à l'anglaise, par déformation globalisée, «choir» comme «chœur». Non celui de la choralité tarte-à-la crème ciné, mais de la tragédie antique, lamentation à la première personne d'un groupe : «Choir/ plancher des vaches/ tu sonnes creux sous mon sabot/ mais tu sonnes/ tu t'étales sous ton poids/ tu es pleine de ton vide/ tu dérapes en surface/ au terme de ta glissade tu butes sur l'horizon/ il n'y a rien au-dessus ni au-dessous de toi/ ton envers est ton endroit».

Choir est en réalité ici le nom d'une île, d'un lieu clos que ses habitants ont pour «seule ambition» de «quitter». C'est la première page et tout l'objet de Choir. «BONDIR HORS DE CHOIR !» hurlent-ils, et parfois aussi ils crient le verbe «ISSIR», défectif dont il ne reste que «issu». Mais cherrait-on si l'on ne bondissait pas ? Non bien sûr. Double mouvement qui nous rappelle au passage que «choir», via «cadere», est de la même famille posthume que «cadavre». Ascension, descente de croix. Ils en ont un, à Choir, de cadavre en perspective, c'est Ilinuk, leur Jésus local qui, dit-on, un jour s'envola hors de Choir et dont ils attendent depuis le retour - puisque selon Yoakam son prophète, il reviendra les décrotter de là.

Comme la vie n'est pas rose à Choir («Nous disposons de trois cent douze mots pour dire gris»), ses habitants s'imposent une discipline féroce de minoratio