En 1959, au moment où Edward Dmytryk tourne l'Homme aux colts d'or, d'après le roman de Oakley Hall paru l'année précédente, le réalisateur vit une paradoxale résurrection. Dmytryk est en effet l'un des fameux Dix d'Hollywood, professionnels du cinéma accusés en 1947 d'activités antiaméricaines et condamnés à de lourdes peines d'enfermement assorties à une interdiction de travailler dans les studios. Depuis sa sortie de prison en 1950, Edward Dmytryk n'a eu de cesse de montrer des signes de repentance sur ce qu'il appelle des «erreurs de jeunesse». Il fait des déclarations publiques pour condamner les activités de communistes aux Etats-Unis, présente des excuses larmoyantes à tous les directeurs de studio, y compris ceux qui l'avaient licencié, et, bien entendu, dénonce ses anciens camarades. Grâce à ce zèle, Dmytryk perd la totalité de ses amis mais parvient à faire à nouveau partie des réalisateurs qui comptent à Hollywood.
Il ne faut sans doute pas chercher plus loin l'origine de la fascination de Dmytryk pour la trahison et la rédemption. Dans l'un de ses plus importants succès de sa seconde carrière, Ouragan sur le Caine, il met en scène Humphrey Bogart en capitaine de vaisseau de guerre, rongé par la paranoïa, obligeant son équipage à se mutiner pour mettre un terme à ses manœuvres délirantes. La scène dans laquelle Bogart est convaincu en plein tribunal de son attitude nuisible peut, à elle seule, être vue comme une justification douteuse de