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Libération
Critique

Doolittle, chambre d’échos

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«Parfaite bisexuelle», la romancière raconte sa psychanalyse avec Freud
publié le 25 mars 2010 à 0h00

«Vous aviez deux choses à cacher, d'une part que vous étiez une fille, d'autre part que vous étiez un garçon.» Cette formule, Freud l'adressa à Hilda Doolittle, dite H.D., qui commentera, à l'idée d'incarner le «phénomène presque disparu [de] la parfaite bisexuelle» et de contribuer à l'histoire de la psychanalyse : «Bon, c'est terriblement excitant.» L'épisode a lieu en 1933, au cours des trois mois d'analyse qu'H.D. a poursuivi avec le maître de Vienne, à raison d'une séance quotidienne. De cette expérience intensive, la poétesse tirera deux textes : «Ecrit sur le mur», dédié à «Sigmund Freud, médecin irréprochable», paru en 1945-1946, et «Avent», extraits de son journal de 1933 rassemblés en 1948. Traduits en français sous le titre Visage de Freud (Denoël) en 1977, devenus introuvables, ils sont aujourd'hui réédités dans une nouvelle traduction, augmentés d'une section réunissant la correspondance entre H.D., Freud et Bryher, et d'une éclairante préface d'Elisabeth Roudinesco, où sont notamment détaillés et contextualisés les fourvoiements de Freud sur la sexualité féminine.

Ménage à trois. En recevant H.D. sur son divan, Freud, alors âgé de 77 ans, a conscience de prendre une patiente à plus d'un égard hors norme. Icône de l'Imagisme, ce mouvement poétique figuré par Ezra Pound dont elle fut l'amante, H.D. a tôt emprunté les chemins du ménage à trois et d'une bisexualité insouciante, en voyageant avec