La vie d’Henry Bauchau est découpée en plusieurs périodes, ce qui peut paraître aller de soi, étant donné que ce romancier, poète, psychanalyste et peintre est né en 1913. Mais une si longue existence pourrait avoir connu une accalmie, ou son acmé, ce moment où les jeux sont faits et où le temps qui reste n’apportera rien de nouveau, n’entamera pas de nouvelles pages.
Cela ne s’est pas passé de la sorte pour Bauchau. Il a commencé à publier tardivement, en 1958, et il continue, à 97 ans, d’explorer les ressources de l’art.
Déluge, son roman sorti début mars, met en scène un peintre, Florian, considéré à la fois comme un génie et un handicapé mental. Naguère, il mettait le feu à ses toiles, qui représentaient beaucoup d'argent, ou aux billets de banque, comme Gainsbourg. En d'autres termes, il a brûlé ses vaisseaux. Il revient à une jeune femme, Florence, non pas de noyer la flamme, mais d'entretenir le feu sacré. Elle aide le peintre à achever une immense toile représentant Noé, l'Arche, le Déluge, et elle n'est pas seule dans cette entreprise. Il y a aussi un jeune assistant, Simon, qui doit désapprendre à peindre, en même temps que Florence, elle, doit au contraire faire l'apprentissage des couleurs.
Et l’apprentissage de la liberté. Florence, qui prend en charge le récit, a vécu par procuration jusqu’à la mort de sa mère. Quand l’histoire commence, un cancer considéré comme fatal l’éloigne de son aliénation native, de son métier d’enseignante, de Paris. Elle s’en va