L'oubli est pire que tout. Depuis la sortie de Gomorra en 2006 et les menaces de mort de la Camorra qui ont suivi, Roberto Saviano s'est lancé dans une lutte de longue haleine contre le silence et l'indifférence auxquels le clan napolitain voudrait le contraindre. Alors, dans «un corps à corps silencieux», l'auteur napolitain de 31 ans a continué d'écrire pour ne pas «s'avouer vaincu». Saviano sait raconter des histoires. La Beauté et l'enfer n'est pourtant pas le nouveau livre qu'il promet depuis de longs mois. Ce recueil rassemble des articles déjà publiés par la Repubblica, El Pais, Il Manifesto, l'Espresso et l'excellent site Nazione Indiana. Qui traduisent son «inconfort», comme il l'expliquait l'année dernière dans ces colonnes.
Ce journal de bord de quatre années de réclusion, témoigne en creux de la triste réalité d'un quotidien encagé : dans cette existence blindée, Saviano vit ballotté de casernes militaires en chambres d'hôtels anonymes, guettant des signes et sondant des mots. Victime du syndrome de l'enfermement, Saviano est donc face à lui-même, à ses interrogations, exposé aux trahisons et au mépris. Il les scande dans une longue lettre à sa terre, «un territoire qui ne sort pas de la nuit». Saviano n'a pas quitté les affres de Gomorra. Il est immergé dans cette réalité au point d'avoir «peur de devenir un personnage à force d'être exposé». Inévitablement, il est devenu ce