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Libération
Critique

Ô vieillesse libertine

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Portrait cubiste d’un vieillard accroché à la dolce vita
publié le 1er juillet 2010 à 0h00

La première phrase de l'Evasion engendrera sans doute un soupir chez le lecteur. De satisfaction ou de lassitude, c'est selon. «Ainsi prit fin le siècle : tandis que Haffner regardait un homme caresser les seins d'une femme.» Non, Adam Thirlwell n'a pas trop changé depuis Politique (L'Olivier, 2004), premier roman qui parlait beaucoup de sexe, et un peu du reste. Thirlwell, donc, pendant sale gosse du gentil Jonathan Safran Foer, qui réaffirme ici sa virtuosité sur presque 400 pages. Même aisance, même désinvolture, même souci d'envoyer valser les contingences littéraires sans se départir de l'apport des aînés - il s'enthousiasme pour Sterne, Joyce, Kundera. Mais si le jeune Britannique galope en terrain conquis, il est aussi suffisamment malin et agaçant pour se placer pile là où on ne l'attendait pas, à savoir du côté de la vieillesse. Le Haffner susnommé, celui qu'on imaginait déjà en trentenaire intello-sexy, est en fait un ex-banquier de 78 ans. De passage en Europe centrale pour régler la succession de sa femme et récupérer une villa confisquée sous le régime nazi, il prend ses quartiers dans un palace. Le décor idéal pour un libertin, même sur le retour. Bien décidé à profiter de son séjour, il s'en va combler un appétit libidinal à la hauteur de son grand âge. Et les conquêtes féminines de se succéder, comme les souvenirs, dans le luxe et la marcescence.

Ce personnage de vieillard frondeur, Adam Thirlwell y croit coûte que coûte. Il le dessi