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Libération
Critique

Minorités. Les Ouïghours asphyxiés

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publié le 28 août 2010 à 0h00

Le SMS a fait irruption au cœur de l'été. Dans l'après-midi du 5 juillet 2009, Sylvie Lasserre reçoit sur son téléphone un message alarmant : «Il y a des manifestations à Urumqi ! C'est terrible, plus de cent morts.» Ces affrontements opposent les Ouïghours, minorité turcophone de l'ouest de la Chine, aux Hans, majoritaires dans le Turkestan oriental, que Pékin dénomme Xinjiang, la «nouvelle frontière».

La journaliste spécialiste de l'Asie centrale n'est pas tombée dans le chaudron ouïghour ce jour-là. Déjà en 2006, sa route avait croisé celle d'Ezizjan, un Ouïghour qui l'introduit auprès de Rebiya Kadeer, la «reine» de ce peuple opprimé, comme les Tibétains, par les autorités chinoises. «Nous vivons dans un immense camp de concentration à ciel ouvert !» lui dira la voix des Ouïgours.

En 2007, Sylvie Lasserre gagne le Turkestan en compagnie d'un type à la mine patibulaire et d'un service à thé. Via Almaty au Kazakhstan, elle pénètre l'empire des steppes bordées de hautes montagnes et gagne la Chine sur des routes défoncées. Bientôt au cœur du Turkestan et à l'ombre des pierres Balbal, elle se retourne sur 1200 ans d'histoire quand ce «pays aux mœurs barbares rempli de fumées de sang» atteint son apogée, selon l'orientaliste René Grousset. Dans son bref journal de route qui sillonne entre Kashgar et Urumqi et entre l'anecdote et l'analyse, Sylvie Lasserre témoigne de la colonisation chinoise tous azimuts, de deux cultures qui s'affrontent jus