L'autre jour, dans le New York Times, un dénommé James Collins racontait une terrible expérience, que beaucoup d'entre nous avons déjà faite. Contemplant sa bibliothèque et passant en revue les titres figurant sur les tranches, il s'est aperçu que nombre de livres ne lui avaient laissé rigoureusement aucun souvenir. Parfois Collins était capable de dire dans quelles circonstances il avait lu ces ouvrages, et pourtant il ne se souvenait absolument pas de l'histoire qu'ils racontaient. Avait-il avalé ces bouquins en vain ? Aurait-il moins perdu son temps en regardant du golf à la télé ? Et surtout : est-ce grave, docteur ?
Le docteur a répondu que non, ce n'était pas grave. Plus précisément, le Dr Maryanne Wolf, directrice du Centre de recherche sur la lecture et le langage à Boston, a rassuré notre lecteur anxieux en ces termes : «Je crois profondément qu'avoir lu ces livres a fait de vous une personne différente, et je vous le dis aussi bien en tant que spécialiste des neurosciences qu'en tant que diplômée de littérature anglaise.» Maryanne Wolf a écrit un joli livre - Proust and the Squid : the story and science of the reading brain - dans lequel elle examine les effets de la lecture au niveau neuronal et cognitif, mettant en évidence la manière dont chaque livre nous recâble (un peu) les méninges. De tout cela, il ressort que «nous sommes la somme des livres que nous avons lus», que nous nous en souvenions ou pas. En d'autres t