Menu
Libération

Les libérations d’un dandy

Article réservé aux abonnés
publié le 2 octobre 2010 à 0h00

C'est l'autre Libé, l'ancien, l'historique, celui de la Résistance. A sa fondation, en 1973, notre journal a repris le titre de l'organe du mouvement Libération, créé dans la clandestinité, devenu quotidien après la guerre et disparu en 1964. A vrai dire, la filiation s'arrête là. Quoique classés tous deux à gauche, les journaux sont très différents par leur contenu et leur orientation. Le premier, celui qui nous intéresse ici, doit tout à son fondateur, dandy combattant, journaliste, puis ministre et député, l'un des premiers à s'être levés contre l'occupant nazi : Emmanuel d'Astier de la Vigerie. Son neveu Geoffroy livre une biographie vivante et pleine de respect familial, qui vient compléter le travail du journaliste Jean-Pierre Tuquoi ou encore celui de Laurent Douzou, historien du mouvement Libération.

Tout dans ses origines aurait pu conduire d'Astier à soutenir le régime réactionnaire du maréchal Pétain : son ascendance aristocratique, son père baron, son milieu très Jockey Club, sa qualité d'officier de «la Royale», comme on appelait la marine française : tout, sauf son caractère rebelle et quelque peu extravagant qui fait mentir le déterminisme sociologique.

Nul hasard dans ce choix. Après sa démission de la marine en 1931, d'Astier s'est changé en un journaliste de gauche mondain et opiomane, instruit, par ses reportages en Allemagne et en Espagne, de la nocivité fondamentale du fascisme, marié à une Américaine, puis à une Russe, fille d'un leader