Jonathan Franzen, l'auteur des Corrections, en a fait beaucoup sur le texte de son dernier livre, Freedom. Hélas ! c'est à partir d'un fichier numérique obsolète, où manquaient les toutes dernières révisions, qu'a été imprimée la version du livre diffusée au Royaume-Uni. Conséquence : le premier tirage britannique de Freedom est parti au pilon et les 8 000 exemplaires déjà écoulés seront gracieusement remplacés.
Ce genre d'accident industriel n'a certes pas attendu l'informatique pour se produire. La célèbre «Wicked Bible» (ou bible vicieuse), imprimée en Angleterre en 1631, avait profité de l'erreur d'un typographe pour asséner, au milieu des autres Commandements, un magnifique «Thou shalt commit adultery» (tu commettras l'adultère), l'omission du «not» ayant failli précipiter le royaume dans une luxure sans fin. C'eût été un moindre mal : un «Thou shalt commit murder» aurait sans doute conduit les croyants à s'entre-tuer. Quelques exemplaires de cette bible subsistent, qui valent désormais leur pesant d'or et de péchés. L'informatique n'aurait pas fait mieux mais, même si elle n'a rien inventé en matière de destruction massive de littérature, elle est parvenue à renouveler profondément le genre autodafé. Notons d'abord que l'écrivain et son PC forment un couple singulier. Le premier, hominidé de sexe et d'âge variables, trouve son utilité sociale en tapant obstinément sur un clavier puis en vérifiant à l'écran que l'acti