Menu
Libération

Jaurès, le sabre et la plume

Article réservé aux abonnés
Le cahier Livres de Libédossier
publié le 9 octobre 2010 à 0h00

Comment changer le monde sans prendre le pouvoir ? A cette question très contemporaine - c’est celle de l’altermondialisme, forme moderne de l’ancien socialisme -, la vie de Jean Jaurès apporte une réponse éclatante. Voilà un homme qui n’a pas passé un jour dans un gouvernement, qui n’a rien connu des palais officiels, qui a exercé tout au long de son existence - mais avec quel génie - le ministère de la parole et dont l’influence, pourtant, se prolonge encore aujourd’hui avec une vigueur sans pareille.

Jaurès domine de sa stature intellectuelle tous les débats de la gauche, il parle aux chrétiens par son spiritualisme, il est utilisé par les libéraux en raison des nuances de sa pensée, il sert surtout de référence à tous ceux qui veulent bouleverser l'ordre des choses sans pour autant verser dans les violences et les crimes de la révolution. Son journal, l'Humanité, quoique longtemps défiguré par le stalinisme, vit toujours avec une sympathique énergie ; le Parti socialiste qu'il a fondé est encore une fois candidat au pouvoir ; le président de la République, même si c'est un détournement impudique, le cite abondamment.

Si ce géant projette toujours son ombre sur nous, si sa fiévreuse personnalité influence encore la vie politique, il le doit à ses talents de philosophe puissant, d'orateur grandiose, de député, de chef de parti inlassable et d'écrivain prolifique. Il le doit aussi - et c'est un aspect souvent méconnu de ce Protée socialiste - à son extraordinaire activ