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Maydicis

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Le cahier Livres de Libédossier
Lauréate du Médicis, la romancière grandie au Havre est l’animatrice surprise de la saison des prix littéraires.
publié le 4 novembre 2010 à 0h00

Maylis de Kerangal, comme son nom l'indique, est une femme aux racines bretonnes. A 43 ans, elle est l'épouse d'un capitaine au long cours devenu courtier maritime, la mère de quatre enfants âgés de 3 à 17 ans, la fille d'une prof d'histoire-géo et d'un pilote de navire. Rien là-dedans ne la prédisposait à devenir l'un de ces «jeunes écrivains» qui viennent par surprise animer une rentrée littéraire. Son roman Naissance d'un pont était dans la sélection de plusieurs prix réputés et, hier, il a décroché le Médicis. Etonnement, donc, mais à bien considérer cette trajectoire singulière, on finit par y distinguer quelques points d'inflexion qui n'expliquent rien mais donnent un mouvement : la ville du Havre, la photo d'un chat roux, l'Etat du Colorado, le Salon nautique, le naufrage du Lusitania.

Commençons par Le Havre. Maylis y passe les 18 premières années de sa vie. La cité, aplatie par les bombes de 1945, a été reconstruite directement sur les gravats, c'était plus simple. Le nouveau centre-ville dessiné par Auguste Perret s'élève sur des ruines, des cadavres et une mémoire mutilée. Ce sont là les ferments d'une jeunesse havraise. Dans la cité géométrique, le vent souffle sans obstacle, tandis qu'à l'horizon, des navires attendent les pilotes sous un ciel gris. Dans la ville terminus, où la famille commence par loger dans un des fameux IsaiI («Immeubles Sans Affectation Individuelle») de Perret, Maylis rêve de Paris, «la ville au bout des rails