Il y a cinq ou six ans environ, un professeur de sciences religieuses fit une découverte étonnante, alors qu’il épluchait, sans raison bien définie, le catalogue de la bibliothèque de l’université de Princeton. Il tomba sur un mémoire de licence présenté au département de philosophie de cette même université en 1942, par un étudiant de 21 ans nommé John Rawls, sous le titre : «Brève enquête sur la signification du péché et de la foi : une interprétation fondée sur le concept de communauté».
L'auteur de ce mémoire vibrant d'une foi chrétienne profonde n'était pas un homonyme de John Rawls, mais John Rawls lui-même, celui qui allait devenir, dans sa maturité, l'un des plus importants penseurs de la démocratie laïque et pluraliste du XXe siècle !
Les exécuteurs testamentaires, sollicités par les premiers lecteurs du mémoire, hésitèrent à donner leur accord à sa diffusion publique, que son auteur n’avait manifestement pas souhaitée. Finalement, il fut publié l’an dernier aux États-Unis, accompagné d’une solide préface de Thomas Nagel et Joshua Cohen, du commentaire avisé d’un philosophe de la religion, et d’un autre texte de John Rawls, écrit cinquante-cinq ans plus tard, en 1997, où il essaie de reconstruire l’histoire de son rapport personnel à la religion.
Holocauste. Le livre a été salué comme un véritable événement éditorial. Un an après seulement, Charles Girard le sort dans l'excellente traduction de Marc Rüegger, sous le titre le P