Sachant que plus de cinq mille ouvrages ont été consacrés à démontrer que les pièces de William Shakespeare ont été écrites par quelqu’un d’autre, on n’essaie même pas d’imaginer combien de dizaines de milliers d’autres l’ont été à raconter l’homme qu’il fut. D’autant que, comme on le sait, on ignore à ce sujet à peu près tout. Dans un livre facétieux et rapide, sous-titré «antibiographie», l’Américain anglophile Bill Bryson en dit beaucoup sur la manière dont on a glosé sur ce presque rien qui échauffe les esprits depuis 1616, date avérée de la mort du génie.
Tendresse.«En quatre siècles d'une quête zélée, résume Bryson, les chercheurs ont trouvé une centaine de documents se rapportant à William Shakespeare et à sa famille proche.» A l'époque, comme on n'utilise pas d'acide, le papier est de bonne qualité. Le testament nous est parvenu sans encombres, qui permet de savoir le peu de choses légué à la veuve. «Aucun document n'indique qu'il y ait eu de la tendresse entre eux, mais après tout aucun document n'indique qu'il y ait eu de la tendresse entre William Shakespeare et quelqu'un d'autre.» Fut-il croyant et dans quelle mesure, jusqu'à quel point a-t-il été un homme cultivé, autant de points également obscurs. De même qu'est à jamais perdue la trace de W. S. entre 1585 et 1592. Quelque part entre ces deux dates, il a quitté le foyer conjugal et s'est consacré au théâtre à Londres, comédien et dramaturge. On connaît en revanche le