Voilà un livre d’un genre hybride, qui combine texte et dessin de manière inhabituelle. Disons que c’est un récit autobiographique illustré, qui raconte la guerre du Liban vue de Beyrouth par une petite fille qui a 7 ans au début du conflit en 1975. Bombardements et fêtes de famille, miliciens et vieilles parentes protégeant leurs bibelots, friandises d’enfants et corps démembrés par la barbarie des combattants, toutes ces images nous sont montrées par Lamia Ziadé, devenue adulte, peintre et graphiste, avec une feinte désinvolture et un vrai humour.
Ketchup. Le livre s'ouvre sur un Bazooka, normal pour un livre de guerre, sauf qu'il s'agit de son chewing-gum préféré. Les couleurs éclatantes des premières pages sont un hommage ému aux produits de l'industrie alimentaire américaine : marshmallows Kraft, cacahuètes Planter's, Smacks de Kellog's, ketchup Lilly's… autant d'images d'un bonheur occidental. Lamia Ziadé nous explique que les Beyrouthins sont persuadés que leur ville est à la fois «la Suisse, le Paris, le Las Vegas, le Monaco et l'Acapulco du Moyen-Orient». Elle ajoute que, des terrasses où la famille va «prendre un banana split, on ne voit pas les bidonvilles chiites et les camps palestiniens. Et, de toute façon, les lunettes de soleil empêchent de voir la crasse».
La fin de l'innocence a une date précise dans la vie de la jeune Lamia. 13 avril 1975. Au retour d'un pique-nique dominical (balançoires dans le jardin, robe à smocks en vi