Parce qu'on les aime trop et parce qu'on s'aime moins, il arrive un moment où l'on se fatigue des mots. On les trouve trop nombreux, trop vagues, trop menteurs, trop libres, trop esclaves, trop dévoués aux figures et aux références. Ils flattent exagérément le talent et l'imagination qu'on s'accorde. Il est temps de revenir à quelque chose de soi-même, tout nu, tout sec, décapé face au monde qui nous envahit : «Les mots sont posés à mes deux oreilles/Et le moindre cri les fait s'envoler.» C'est le moment de lire Pierre Reverdy.

Longtemps, ses textes restèrent introuvables. Puis vint l'édition inachevée en 12 tomes, publiée par Flammarion à partir de 1967. La nouvelle édition critique en deux tomes, complète, réunit les recueils de poèmes, poèmes inédits, contes, son roman poétique (le Voleur de Talan), les textes critiques parus dans la revue Nord-Sud et tout au long de sa vie, des articles de presse sur l'art, la poésie, le cinéma et même sur Staline. Ce trésor est dû au travail de deux hommes dont l'érudition rend les morts implacables : François Chapon et Etienne-Alain Hubert. Le premier a connu Reverdy et fait de la bibliothèque Jacques Doucet, en un demi-siècle, un paradis littéraire et artistique. Le second a dirigé la publication des deux derniers tomes des Œuvres complètes d'André Breton dans la Pléiade (1). Il prépare pour 2013 une nouvelle édition des Œuvres poétiques de Guillaume Apollinaire.

Arêtes. Reve