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TRIBUNE

Mes histoires d’amour sont reykjavickoises

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par Steinunn Sigurdardóttir, Dernier livre paru : «Cent Portes battant aux quatre vents» (Héloïse d’Ormesson.2011)
publié le 17 mars 2011 à 0h00

Il est indéniable que le mot autofiction pose problème. Il suscite des associations intempestives avec un univers automatique, évoquant le pilote du même nom. C’est un bon mot pour la navigation aérienne, mais il fait obstacle à l’envol de l’imagination. Car l’écrivain qui ne se donne pas la peine, ou qui ne sait pas parer sa propre expérience des ailes de l’imagination court le risque de crasher. Pour dire les choses crûment, je trouve que l’expérience vécue est un matériau de fiction inutilisable, à moins d’être passé par les métamorphoses et les divagations infinies de l’imagination. La notion selon laquelle la fiction acquerrait respectabilité ou crédibilité du fait que «ça s’est passé en vrai» est une tendance qui me fait peur. Tendance devenue si commune qu’on manque de mots pour la désigner. Puis-je avancer les expressions néologiques de «credo du crédible» ou «d’inanité de la véracité» ?

Ce phénomène rejoint les enquêtes préliminaires qui sont aujourd’hui à la mode chez les romanciers et il suscite mon étonnement. Pour quoi faire ? Le monde de la recherche factuelle n’appartient-il pas aux savants ? Le romancier va-t-il s’appuyer sur des critères objectifs ? Se transformer en scientifique de la fiction ? La science tourne autour de règles et de principes ; la fiction est tout le contraire, elle est entorse à la règle du jeu, elle est art de l’exception à toutes les règles. La fiction a trait à l’imagination, à la voltige des idées ; la science s’occupe des faits. Rédu