Cher Monsieur Queneau, sous-titré «Dans l'antichambre des recalés de l'écriture», présenté par Dominique Charnay, paraît le 14 avril aux éditions Denoël. Il s'agit de lettres conservées par Raymond Queneau - éditeur chez Gallimard, chef du comité de lecture -, adressées par des gens dont il avait refusé le manuscrit. Beaucoup font rire, comme on peut rire des perles qu'on trouve dans la presse ou les copies de bacheliers. C'est un livre qui ne contient aucune ligne de Queneau lui-même. Mais qui appartient à son monde. Extraits en exclusivité.

«Aurez-vous le beau courage que j’ai eu de me relire jusqu’au bout ?»

«Vannes, le 18 novembre 1949

Cher Monsieur,

Vous êtes très gentil d’avoir accepté de lire mon manuscrit.

Avant de vous l’expédier cet après-midi, je l’ai parcouru rapidement, non pour le bichonner mais pour le débarbouiller du plus gros de ses imperfections. Mais hélas ! en province comme à Paris, la vie vous bouscule : chaque jour, cinq heures à la boutique, quatre consacrées à un journal départemental et à un journal nantais.

Quant aux dimanches qui, pour un écrivain du dimanche, devraient être réservés à l’ «enrichissement» de la littérature, je les emploie à courir les congrès, les inaugurations ou les crimes, quand les assassins ne respectent pas le repos dominical.

Aurez-vous le beau courage que j’ai eu de me relire jusqu’au bout ? Je le souhaite. Le début de mon histoire m’a paru un peu lent, puis j’ai eu l’impression que petit à petit l’intr