C’est un petit exercice mental que nous suggère Alain Minc, dans son dernier ouvrage : fermez les yeux, ouvrez les yeux, comme si un battement de paupières pouvait chasser nos idées sombres, et d’un œil neuf nous faire voir notre monde à nous, Européens. Que verrions-nous alors ? Un petit coin de paradis, chemin faisant… Une terre de liberté, de justice, de démocratie, d’équilibre, exemplaire, exceptionnelle. Prisonniers de nos angoisses et de notre pessimisme autant que de notre narcissisme, nous serions aveugles aux réalités de notre quotidien.
Nous ne prendrions pas la mesure, d'abord, de cet espace béni pour les libertés qui est le nôtre, le plus sophistiqué de la planète. Minc décrit cette puissante dynamique libérale, voire libertaire, qui se développe au sein des pays de l'Union européenne. Une «contagion de la liberté», un florilège d'avancées qui touche tous les domaines de la vie en société, la liberté d'expression, le droit à la critique et à l'ironie à l'égard des religions, la liberté des mœurs, une justice tempérée, une immigration légale généreuse… Chiffres à l'appui, Alain Minc démontre qu'un engrenage vertueux fait s'aligner les Etats les plus rétifs sur les plus audacieux. «La contagion se développe à travers l'osmose des comportements, la fluidité de l'information, l'analogie des réactions», écrit l'auteur qui célèbre l'émergence d'un «homo europeanus». Les sociétés ont pris la main. Ainsi la France finira-t-elle bien par s'aligner sur l'Espagne, p