D'un côté, il y a le monde des appareils, des petites phrases et des petits meurtres entre amis : Vincent Peillon le connaît bien, lui qui a été de toutes les batailles à la tête du PS depuis quinze ans. De l'autre, il y a la philosophie, où - changement d'échelle - la mort de Dieu nous a abandonnés au temps «des crimes, des deuils, des spectres». Là aussi, Peillon, agrégé de philosophie, est à son affaire. Et c'est fort de cette double familiarité qu'il entreprend ici de renouer le lien entre ces deux univers, à un moment où la perte de substance philosophique de la politique traditionnelle n'a jamais été aussi éclatante. Et navrante.
Avec la mort de Dieu, dit Peillon, nous avons perdu, l'ancienne façon de désigner l'«œuvre commune», la «responsabilité partagée». Autrement dit : tout ce qui donne un sens à la politique. «La politique a toujours besoin d'une métapolitique», dit-il. Mais aujourd'hui, la politique est sans horizon, un «positivisme politique», une démocratie «purement procédurale», une «mystification libérale». Tout réduire à quelques principes universels, tel est le mot d'ordre ; quant à la réalité, il paraît qu'elle est trop complexe et qu'il faut la laisser aux experts. Peillon avance une définition cinglante : «La complexité est la forme noble du renoncement contemporain.»
Comme antidote au renoncement, Peillon emprunte un long et passionnant détour par Merleau-Ponty. Après la Seconde Guerre mondi