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Libération
Critique

Beaumord et bien vivant

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Le cahier Livres de Libédossier
Alain Corbin dans les habits d’un instit de la fin du XIXe
publié le 21 avril 2011 à 0h00

Morterolles est une petite commune rurale de la Basse-Marche, au nord de Limoges. A la fin du XIXe siècle, elle comptait 643 habitants, éparpillés entre le bourg et ses «écarts», les onze hameaux des alentours. Elle ne possédait ni médecin ni juge de paix, mais elle avait un instituteur zélé, du nom de Paul Beaumord. Durant l'hiver 1895-1896, qui fut assez froid, M. Beaumord organisa dans son école dix conférences sur des sujets d'actualité ou d'intérêt général, auxquelles il convia les habitants de Morterolles. Comme il était également assez fier, il fit publier dans le Nouvelliste de Bellac les titres de ses conférences ainsi que le nombre de ses auditeurs.

Cette affaire a intrigué Alain Corbin. L’historien connaît bien le Limousin, où il a enseigné et auquel il a consacré ses deux thèses. Il aime aussi les défis, comme celui tenté, il y a une douzaine d’années, pour reconstituer la vie d’un sabotier anonyme du Perche. Le pari, ici, était d’une autre nature : si l’on connaissait les intitulés des leçons, il restait à en imaginer le contenu et à comprendre les raisons qui poussèrent les habitants de Morterolles à braver le froid et la nuit pour retrouver le chemin de la salle de classe.

Deux récits s'entrecroisent donc dans le livre. Le premier, adossé aux archives communales et au dossier personnel de l'instituteur, s'attache à planter le décor et à présenter les acteurs. Paul Beaumord (qui est également secrétaire de mairie) est un parfait repré