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Libération
Critique

Sartre à huis clos

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Le cahier Livres de Libédossier
Conversations inédites entre le philosophe et son «non-filleul»
publié le 21 avril 2011 à 0h00

Fernando est allé se saouler à la Closerie. Stépha est restée à la clinique, auprès de son bébé. On ne sait pas s’ils sont arrivés ensemble : mais Castor et Sartre ont été les premiers à rendre visite au petit John. Fernando Gerassi est peintre, ami de Modigliani, Chagal ou Picasso. Né à Istanbul d’une famille séfarade, il fait ses études en Allemagne - dans la même classe que Heidegger - et, marqué par les cours d’Edmund Husserl, se destine à la philosophie. C’est lui qui, probablement, fait découvrir à Sartre la phénoménologie, avant que celui-ci, succédant à Raymond Aron, n’aille en parfaire la connaissance à l’Institut français de Berlin. Il quitte la philosophie pour la peinture après avoir assisté, par hasard, à une conférence de l’historien d’art Heinrich Wölfflin. Engagé dans la guerre d’Espagne, il est l’un des généraux de l’armée républicaine.

Noises. Stépha Awdykowicz est une émigrée ukrainienne. Elle prépare l'agrégation de philosophie à la Sorbonne et a pour meilleure amie Simone de Beauvoir, qui reconnaît avoir appris d'elle à «s'habiller de manière plus aguichante, à se faire les ongles, pour draguer les superbes Hongrois de la bibliothèque». Avec Fernando, qu'elle épouse en 1929, Stépha a «le même genre de relations» que Sartre avec Castor, mais sans les «liaisons contingentes». Sartre est amoureux d'elle, mais Stépha, «sacrée flirteuse» bien que «puritaine», croit à «la fidélité envers Fernando